Amel, l’endurante

Petite fille, Amel rêvait de devenir hôtesse de l’air. « Pour voyager, pour le statut, pour le prestige, pour l’élégance », confie-t-elle. Son bac en poche, elle s’est donc inscrite à l’École française d’hôtellerie et de tourisme, à Paris. Puis direction l’association Jérémy, créée en 1998 à l’initiative de la compagnie Air France et d’entreprises partenaires, afin de favoriser l’insertion professionnelle des jeunes et des demandeurs d’emploi. Amel se forme, s’informe et devient hôtesse au sol pour des vols Air France. À Roissy, puis Orly. « J’ai adoré l’uniforme, les talons, faire l’appel pour l’embarquement des passagers, les voir heureux à l’idée de décoller, partir, voyager… » Deux ans et demi plus tard, la naissance de son premier enfant chamboule tout. « Les horaires décalés, ce n’était plus possible », dit-elle. Faire autre chose ? Amel a envie d’ouvrir un salon d’esthétique. Retour sur les bancs de l’école – l’IUT de Marne-la-Vallée – pour décrocher un Diplôme Universitaire Création d’Activité. « J’étais enceinte pour la deuxième fois quand j’ai repris les cours », se souvient Amel. Mais, finalement, une fois diplômée, elle ne se lancera pas dans l’entrepreneuriat. Trop chronophage pour une mère de famille qui n’a pas encore 25 ans.
« La bonne proximité avec les patients, les usagers et les résidents »
Son jeune âge permet à Amel d’être suivie dans une mission locale du Val-de-Marne, département où elle vit. Elle prépare en parallèle un diplôme d’assistante de direction bilingue, qu’elle obtient haut la main. « J’ai cherché, ensuite, un poste d’agent administratif. » Cette même mission locale lui propose alors d’animer un atelier « CV et lettres de motivations ». Amel accepte, sans a priori. La suite ? Un an plus tard, elle répond « par hasard » à une annonce de l’Union pour la défense de la santé mentale (UDSM), qui cherche du renfort pour ses équipes. Nous sommes en 2011. Quarante-huit heures après l’envoi de sa candidature, Amel est contactée par la DRH de l’association. Son profil plait. Sa spontanéité aussi. Elle est embauchée. « Les premières semaines, je ne comprenais rien aux acronymes du secteur de la santé mentale ! » Un peu perdue, mais pas découragée. Amel apprend tout sur le tas. Ce qu’elle préfère ? « Échanger avec les patients, les usagers et les résidents, trouver la bonne proximité – et non la bonne distance – avec eux. » Rapidement, on élargit son champ d’action, ainsi que ses fonctions. En 2015, elle devient adjointe de direction. Un poste qu’elle va cumuler, à partir de 2019, avec des cours du soir au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam), où elle suit le cursus d’une licence « Gestion des organisations ». « Je rentrais chez moi, à Villiers-sur-Marne, à 22h30 et je posais des congés pour réviser mes partiels. »
« Beaucoup d’humain et une grande écoute »
Pugnace, motivée, déterminée, Amel va suivre les conseils du directeur général de l’UDSM. Nous sommes en 2022 et il lui suggère de postuler pour la direction du Pôle Hébergement de l’association. Elle l’écoute, tente sa chance et obtient le poste, tout en ayant encore en poche sa carte d’étudiante au Cnam. Et pour cause : en octobre 2025, elle a décroché un master « Gestion des établissements sanitaires et médico-sociaux ». Aujourd’hui mère de trois adolescents, Amel maitrise tous les acronymes du secteur de la santé mentale. Un univers dans lequel elle s’épanouit toujours. « Lorsque l’on me demande ce que je fais dans la vie, je réponds que je travaille dans la santé mentale. Ce qui signifie accompagner des personnes, être à côté d’elles, les aider à vivre avec la maladie, à accepter celle-ci, à suivre un traitement et à en supporter notamment les effets secondaires… C’est un travail qui nécessite beaucoup d’humain et une grande écoute. » Sensible aux marques de reconnaissance de ses pairs, elle évoque, tour à tour, la DRH et le directeur général de l’UDSM qui ont su lui faire confiance. Puis elle raconte, avec émotion, l’anecdote de ce couple de jeunes travailleurs en Établissements et services d’accompagnement par le travail (Esat) : « Leur contrat de bail devait s’arrêter et ils attendaient la naissance d’un enfant. Avec mon équipe, nous avons alors noué des liens avec la mairie de Vincennes, qui a mis un appartement à leur disposition et trouvé une place en crèche. Aujourd’hui, ils vivent toujours à cette même adresse, ils ont désormais deux enfants et je continue d’aller les voir. » Des projets ? Amel en a des tonnes. À long terme, elle n’exclut pas d’entreprendre un doctorat. Et à très court terme : « Là, tout de suite, je vais aller m’acheter un sandwich à la boulangerie, puis j’irai au Comité de direction de l’UDSM. »